Vox – Christina Dalcher

Titre original : Vox
Traduction (anglais) : Michael Belano
Nil, 2019, 432 pages

 

La première phrase :

Si on m’avait dit qu’en une semaine, j’allais faire tomber le Président, le Mouvement Pur, et ce petit merdeux incompétent de Morgan LeBron, je n’y aurais pas cru.

 

L’opinion de Miss Léo :

Je remercie l’éditeur pour l’envoi de ce titre. Malheureusement, je n’ai guère été enthousiasmée par cette énième dystopie “féministe”, qui surfe maladroitement sur le succès de La servante écarlate. Le résumé m’intriguait pourtant : dans un futur proche, le gouvernement américain interdit aux femmes de prononcer plus de cent mots par jour ; au delà de ce quota, le bracelet qu’elles portent au poignet leur envoie de violentes décharges électriques. La quatrième de couverture laissait entrevoir une réflexion sur le langage, abordée par le biais de considérations neuro-linguistiques.

Las ! Je suis effarée par le manque de subtilité de l’intrigue. Christina Dalcher s’inspire fortement de La servante écarlate, mais l’asservissement des femmes repose ici sur un gadget technologique (le bracelet compte-mots), auquel il est difficile de croire. Autant le dire franchement : ça ne fonctionne pas du tout ! Rappelons que le roman de Margaret Atwood a été publié dans les années 80, d’où son côté visionnaire (même si à l’époque, je crois que c’est surtout l’Iran qui a servi de modèle). À trop vouloir se calquer sur la situation politique actuelle, les dystopies récentes en deviennent ridicules, et totalement contre-productives. Ici, nous avons donc un (mauvais) président fraîchement élu, marié à un mannequin (une potiche), qui bénéficie du soutien des ultra-conservateurs, et dont l’action gouvernementale est pilotée par une poignée de religieux sans scrupule. On est d’accord, c’est grotesque… On apprend même au détour d’une phrase que l’ancien président était noir. Plus subtil, tu meurs !

Les personnages sont superficiels, et peu développés : le mari falot ; l’amant italien viril ; l’amie féministe militante ; la collègue lesbienne ; la voisine croyante, qui endosse volontairement son rôle d’épouse soumise (bonjour Serena Joy) ; le fils macho ; le facteur enrôlé dans la résistance… Que des archétypes, auxquels l’auteur ne parvient pas à donner la moindre existence charnelle. L’héroïne me plaisait au début, mais cela n’a pas duré.

Vox est un roman qui se veut féministe, mais tenez-vous bien : c’est un homme qui se sacrifie pour sauver le pays ! D’ailleurs, si l’Amérique en est arrivée là, c’est parce que les femmes ne sont pas allées manifester lorsqu’elles en avaient la possibilité (sic) (rire sarcastique). Ajoutez à cela une écriture terne, plate et peu convaincante (rien à voir avec le style de Margaret Atwood, qui est un véritable écrivain), des péripéties absurdes (voire totalement invraisemblables, à l’image de cette tentative de bio-terrorisme, à laquelle on ne croit pas un seul instant), et un dénouement bien trop rapide et décousu à mon goût (vive le sérum miracle qui fonctionne dès le premier essai), et vous obtiendrez une sorte de gloubi-boulga littéraire sans grand intérêt.

Je suis sûre qu’il plaira au plus grand nombre (je vois d’ici les critiques dithyrambiques, qui ne manqueront pas de le qualifier de roman “glaçant” ou “addictif”). Pour ma part, j’y vois surtout un mauvais thriller, et une dystopie bancale.

 
Une dystopie opportuniste faiblarde, dont on peut aisément se dispenser.
 

 

6 thoughts on “Vox – Christina Dalcher

  1. Bon… moi qui me réjouissais à la perspective de cette lecture… je vais lire un autre truc en attendant que ça me reprenne 🙂

    1. Désolée d’avoir douché ton enthousiasme. La rabat-joie de service a encore frappé ! 😉 D’un autre côté, il y a plein de gens qui aiment, donc mon avis n’est peut-être pas totalement fiable…

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