Meurtriers sans visage – Henning Mankell

Points, Editions Christian Bourgeois, 1991, 386 pages

 
La première phrase :

Il a oublié quelque chose, il le sait avec certitude en se réveillant.

 
L’histoire :

L’inspecteur Kurt Wallander enquête sur le meurtre d’un couple de paysans, torturés et assassinés avec sauvagerie dans leur ferme de Scanie. Un acte d’une violence d’autant plus incompréhensible que les victimes étaient des personnes âgées apparemment sans histoire, disposant par ailleurs de bien maigres ressources financières. Transportée à l’hôpital, la vieille femme à l’agonie a tout juste le temps de prononcer le mot “étranger” avant de rendre l’âme. L’affaire prend alors une tournure inquiétante, et le camp de réfugiés demandeurs d’asile de la région devient vite la cible d’un déferlement de haine et de violence. La police d’Ystad va tout mettre en oeuvre pour trouver le(s) coupable(s) au plus vite.

 
L’opinion de Miss Léo :

 

Le premier roman d’Henning Mankell somnolait depuis (trop) longtemps dans ma PAL. On m’avait pourtant dit le plus grand bien de cet auteur, et je me réjouissais à l’idée de découvrir les aventures prometteuses de l’inspecteur Kurt Wallander. Je suis en effet amatrice de littérature policière, plus particulièrement lorsque l’auteur s’attache à développer la personnalité du détective au fil de ses enquêtes. A cela s’ajoutait ma volonté de découvrir la littérature scandinave : j’ai dévoré les trois tomes de Millenium, et je me sens très attirée par ce petit vent d’air frais venu du nord, qui renouvelle avec bonheur l’univers très codifié du polar. J’ai d’ailleurs acheté un Camille Läckberg, que je n’ai toujours pas lu (acheter des livres que je ne lis pas, voilà bien un domaine dans lequel je suis experte). Foin de blablatages, venons en au fait ! Toutes les conditions étaient donc réunies pour que je me décide ENFIN à sortir Meurtriers sans visage de ma PAL.

 

Henning Mankell

 

J’ai décidé de lire les Wallander dans l’ordre chronologique, afin de ne rien rater de l’évolution du personnage principal. Voici donc le premier volume de la série, écrit en 1990. Kurt Wallander, la quarantaine, amateur d’opéra et inspecteur de police à Ystad, est un homme las et angoissé, fragilisé par son récent divorce. Il est même à la limite de la dépression, ce qui se traduit par une hygiène de vie des plus déplorables : hamburgers, café, alcool, nuits écourtées… Ce n’est pas la fête chez notre ami Kurt, qui doit par ailleurs composer avec son vieux père sénile, lequel lui en fait voir de toutes les couleurs. Son travail n’est pas non plus de tout repos : Wallander prend sa mission très à coeur, et n’hésite pas à payer de sa personne.

 

“Tu as peur, se dit-il. Tu as peur, Kurt Wallander.”

 

Il sera d’ailleurs blessé à de nombreuses reprises au cours de l’enquête, qui se révèlera particulièrement longue et ardue. Wallander est donc un personnage assez attachant, bien qu’il puisse parfois se montrer désagréable et susceptible.

 

Un passage qui m’a fait sourire :

 

“Il s’aperçut que son rhume ne s’était pas déclaré. Il avait disparu aussi rapidement qu’il était venu. Cela lui était déjà arrivé plusieurs fois auparavant. Quand il avait beaucoup à faire, il ne s’accordait pas le luxe d’être malade. Mais, une fois une enquête criminelle terminée, il était fréquent que l’infection se déclenche aussitôt.” (page 179)

 

[Aparté] Ca alors, c’est exactement comme moi ! Premier jour de vacances, et hop, mes défenses immunitaires qui chutent, et la maladie qui se déclare sans prévenir. Chienne de vie ! [Fin de l’aparté]

 

J’ai été séduite par l’univers de ce premier opus. Meurtriers sans visage n’est probablement pas le plus abouti de la série, mais contient déjà tous les ingrédients qui font le succès et l’originalité des grandes sagas policières. J’ai aimé le style d’Henning Mankell. Les personnages évoluent dans une ambiance presque fantomatique, marquée par l’omniprésence du vent, qui semble souffler sans interruption sur la campagne suédoise. Un univers sombre et triste, dans lequel le mal s’insinue progressivement. Nous suivons le déroulement de l’enquête policière dans ses moindres détails, et si la conclusion s’avère légèrement décevante, l’on ne regrette pas pour autant d’avoir passé ces quelques centaines de pages en compagnie de Wallander, qui demeure le principal atout du roman.

 

D’autres thèmes sont abordés. Les journalistes en prennent ainsi pour leur grade : la presse déforme les propos des policiers, n’hésitant pas à attiser des haines déjà tangibles. Le roman pose également un certain nombre de questions concernant le statut des immigrés, plus particulièrement celui des réfugiés. Comment sont-ils traités à leur arrivée en Suède ? Le pays doit-il ouvrir ses portes à tous les demandeurs d’asile ? Un sujet déjà d’actualité en 1990, qui trouve une résonance très forte dans la France d’aujourd’hui.

 

“Combien de temps pourrait-on continuer à pratiquer une politique libérale en matière de droit d’asile sans risquer d’aboutir au chaos ? Existait-il une limite à ne pas dépasser ?” (page 349)

 

La Suède semble être un pays contradictoire, dont la société aurait plutôt tendance à se replier sur elle-même, alors même que le peuple suédois se veut ouvert et accueillant. Je suis plutôt ignorante en matière de culture scandinave, et ne me risquerai donc pas à tenter une analyse plus poussée !
 

Un peu de tourisme…
 

Avec Kurt Wallander, le lecteur découvre une région du Sud de la Suède, la Scanie. On peut rejoindre Ystad depuis Copenhague, en train ou en ferry.

 

Source : Google Maps

 

Il se trouve que j’ai eu l’occasion de visiter Ystad en 2007, à l’occasion d’une compétition d’escrime. Un désastre sur le plan sportif, mais une belle expérience touristique, puisque nous en avions profité pour passer quelques jours à Copenhague. 
 
Ystad est une petite ville côtière typiquement suédoise, dans laquelle il n’y a visiblement pas grand chose à faire. Nous n’avions pas pris beaucoup de photos. En voici tout de même quelques-unes :
 

Rue piétonne

 

Ystad

 

Le port et le ferry

 

Le train de Copenhague

 
 
Pour prolonger le plaisir :
 

Très satisfaite de ma première rencontre avec Henning Mankell, j’ai d’ores et déjà envie de lire ses autres romans.

 

 

– Les Chiens de Riga 
– La Lionne blanche
– L’Homme qui souriait 
– Le Guerrier solitaire 
– La Cinquième Femme 
– Les Morts de la Saint-Jean
– La Muraille invisible 
– Avant le gel 
– L’Homme inquiet 
– Les Chaussures italiennes (ce n’est pas un Wallander, mais Henning Mankell a reçu une pluie de critiques élogieuses pour ce livre)

 

Kenneth Branagh

 

J’ai également très envie de voir l’adaption BBC de la série, Les enquêtes de Kurt Wallander, avec Kenneth Branagh dans le rôle titre. Celui-ci me paraît parfait pour le personnage. C’est un acteur que j’ai toujours apprécié, en dépit de son côté légèrement cabotin.

 

Je vais pour finir me replonger dans les enquêtes de l’inspecteur Rebus, autre série de bouquins géniaux, de l’écossais Ian Rankin. Je trouve qu’il existe certaines similitudes entre les deux, bien que ma préférence aille pour l’instant aux Rebus (normal, j’en ai lu plusieurs). A suivre…

 

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Nous sommes le 21 avril. Ce billet marque ma deuxième participation aux 12 d’Ys, catégorie Scandinaves.

 

 

Cette lecture compte également pour le Challenge Petit Bac, puisque le titre contient une partie du corps !

 

 

Troisième participation au Défi Voisins Voisines organisé par Anne.
 

 

Enfin, j’ai lu ce roman dans le cadre du défi S.T.A.R. : 386 pages de plus !

 

 

15 thoughts on “Meurtriers sans visage – Henning Mankell

  1. Comme d'habitude, tout pareil, il dort dans ma PAL aussi, j'ai envie de le lire depuis longtemps, j'ai aussi envie de voir l'adaptation, mais j'attendais d'avoir lu le livre et les chaussures italiennes me tente aussi. Et j'adore la littérature scandinave 😉 Par contre, je ne connais pas les Rankin et je suis tentée.

    1. Jette toi sans arrière pensée sur les Ian Rankin ! L'inspecteur Rebus est un personnage intéressant, et les enquêtes sont bien ficelées. La série offre également de belles descriptions d'Edimburgh.

  2. Eh bien quel billet, il nous fait voyager en plus ! moi aussi, j'ai envie de lire la série dans l'ordre, il serait d'ailleurs temps.

    1. Je regrette de ne pas avoir lu les Wallander AVANT d'être allée à Ystad ! Mon voyage n'en aurait été que plus intéressant (Ystad étant par ailleurs une ville assez quelconque).

  3. Le journalisme reparaît dans d'autres enquêtes… De même que les faits de société. Je note celui-là, bien que je ne sois pas totalement convaincue par cet auteur… J'ai abandonné la lionne blanche mais j'ai beaucoup aimé le cerveau de Kennedy… C'est vrai que j'aime bien toute la littérature nordique parce que effectivement, on découvre ces régions et pays… Je ne savais pas que ça avait été adapté, j'aimerai bien les voir…

  4. Billet archi complet (bravo, j'admire !). J'aime l'écriture de Mankell (son génie pour imposer une ambiance, sa logique implacable et sans défaut) et lu beaucoup de Wallander (pourtant jamais chroniqués sur mon blog).

    1. J'ai moi aussi été séduite par l'écriture de Mankell, et je compte bien renouveler l'expérience. Contente que mon billet t'ait plu ! Je suis pourtant passée par de longues phases de découragement en l'écrivant…

  5. Cabotin, Brannagh !!! Arg (j'ai vu de loin une adaptation, mais comme je lis en regardant la télé, je ne retiens pas tout…)

  6. Bonjour ! J'ai aussi lu le premier de la série. Comme toi, j'ai aussi décidé de les lire dans l'ordre chronologique.
    J'ai aimé "Meurtriers sans visages", mais ce n'est pas un livre qui m'a tenu en haleine comme je l'aime. Cela ne veut pas dire que je n'ai pas aimé et je lirai les autres qui suivent car on ne m'en a dit que du bien. Quelle bonne idée d'avoir fait un petit reportage touristique !

  7. Rebonsoir, j'espère que depuis 1 an, tu auras eu l'occasion de lire d'autres "Wallander": je te conseille la 5ème femme et Les morts de la Saint-Jean. Sinon, je trouve que les adaptations des romans à la télé avec Kenneth Branagh, plutôt réussies. Bonne soirée.

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