Les Bibiomaniacs de janvier : une spéciale “Femmes d’exception” !

 

L’émission de janvier des Bibliomaniacs est en ligne depuis une semaine !
 
L’occasion pour moi de vous dire un petit mot rapide des quatre livres présentés (pour en savoir plus, c’est simple : écoutez le podcast !!).

 

Mémoires d’une jeune fille rangée, de Simone de Beauvoir
Le premier tome d’une autobiographie que l’on ne présente plus ! Un récit rétrospectif à la fois léger et profond, intime et universel, simple mais nourri d’une brillante réflexion sur la vie et les relations humaines. J’ai une préférence pour la partie centrale, consacrée à l’adolescence de Simone dans les années 20. Celle-ci se construit alors en tant que femme et philosophe, et s’émancipe peu à peu de sa famille bourgeoise et catholique traditionnelle, en se tournant vers des fréquentations susceptibles de favoriser son développement intellectuel. D’une intelligence remarquable, cette oeuvre majeure et très bien écrite se révèle pourtant étonnamment accessible. Je lirai sûrement la suite !

 

 

La marche du cavalier, de Geneviève Brisac
J’ai peu de choses à dire sur cet essai littéraire, dont je ne conserverai malheureusement pas un souvenir impérissable. Les thématiques abordées sont pourtant intéressantes. Geneviève Brisac (que je connais surtout en tant qu’ancienne éditrice de L’Ecole des Loisirs) s’interroge sur l’existence d’une littérature féminine. Les femmes écrivains se démarquent-elles de leurs mâles collègues ? L’auteur décortique la façon d’écrire de quelques romancières (Jane Austen, Virginia Woolf, Ludmila Oulitskaïa, Karen Blixen, Jean Rhys, Alice Munro…), et arrive à la conclusion suivante : les deux sexes ne se différencient pas par leur style, mais par les thèmes abordés, les femmes parlant plus volontiers de sujets quotidiens, qu’elles utilisent pour percer le mystère de la vie et de l’âme humaine. Pertinent pour ce qui est du fond, le texte se révèle pourtant décevant quant à la forme. Les différents chapitres manquent de fil conducteur, et l’ouvrage me paraît très confus, comme si l’auteur n’était pas parvenue à structurer sa pensée. Je suis pour ma part incapable d’en résumer le propos, bien que j’y aie sur le moment trouvé matière à réflexion. Plus “grave” : Geneviève Brisac se complaît dans une glorification du passé, sur le mode “c’était mieux avant”, que j’ai pour ma part trouvée légèrement agaçante. J’en ressors toutefois avec l’envie de (re)découvrir toutes ces formidables romancières (ce qui n’est déjà pas si mal).
 
L’idée ridicule de ne plus jamais te revoir, de Rosa Montero

Vous savez toute l’admiration que je porte à Rosa Montero, déjà maintes fois chroniquée sur le blog. J’ai lu plusieurs de ses romans, tous portés par de superbes personnages féminins, ainsi que son (formidable) essai sur l’imagination. Je ne pouvais pas passer à côté de ce récit consacré à Marie Curie, à la frontière de plusieurs genres littéraires (biographie, autobiographie, essai). Rédigé dans un style très vivant, celui-ci revient sur les événements marquants de la vie fascinante de la chimiste binobélisée, notamment sur sa relation avec son mari Pierre, accidentellement décédé en 1906. Le deuil de Marie entre en résonance avec celui de Rosa Montero, cette dernière ayant également perdu son époux Pablo. On peut donc y voir un essai sur le deuil et l’absence, tout autant qu’une réflexion sur la place de la femme dans la société. La romancière et journaliste espagnole installe une forme de connivence avec le lecteur, avec lequel elle partage son enthousiasme et ses interrogations, tout en laissant parfois libre cours à son imagination (j’aime ce côté “bavard” du récit). Le ton est chaleureux, les aspects biographiques bien documentés, l’extrapolation pertinente, et Rosa Montero rend un bel hommage à la femme de sciences, dont l’intelligence et l’abnégation forcent le respect. J’ai noté quelques maladresses, quelques redites aussi, mais ce récit original et personnel demeure toutefois excellent et pétillant d’intelligence, même si ce n’est pas mon préféré de l’auteur.
 
Culottées, de Pénélope Bagieu

J’aime beaucoup Pénélope Bagieu ! Pour mon plus grand bonheur, les éditions Gallimard proposent une superbe édition brochée en deux volumes des portraits de femmes “culottées” publiés en 2016 sur le blog éponyme. A la fois drôle et émouvant, sensible et engagé, léger et grave, l’ouvrage se déguste le sourire aux lèvres. De Josephine Baker à l’impératrice Wu Zetian, de Margaret Hamilton à Leymah Gbowee (Prix Nobel de la Paix en 2011), en passant par Giorgina Reid (gardienne de phare à Montauk), Annette Kellerman (inventrice du maillot de bain une pièce), Tove Jansson (la créatrice homosexuelle de Moumine le troll) ou Las Mariposas (soeur rebelles sous la dictature de Trujillo en République Dominicaine), ce sont quinze destins de femmes volontaires qui nous sont ici contés, sous forme de courtes bandes-dessinées.

Agnodice, gynécologue grecque



Pénélope Bagieu défend la cause des femmes, sans pour autant tomber dans un féminisme outrancier. La juxtaposition de portraits de femmes guerrières, impliquées dans des combats politiques parfois meurtriers, et de destinées plus anecdotiques se révèle particulièrement judicieuse. Lutte pour les droits des femmes, contre le racisme et les préjugés, libération du corps, défense du droit à une vie amoureuse et sexuelle épanouie : la diversité des portraits permet d’aborder des sujets divers, tous pertinents, même si certaines histoires m’ont moins touchée que d’autres. Les petites touches humoristiques font mouche, et le propos n’en est que plus subtil.
 

Wu Zetian, impératrice du VIIème siècle

Cerise sur le gâteau : les dessins sont vraiment chouettes, et les doubles pages qui concluent chaque portrait sont superbes. Seul regret : on est parfois frustré que les portraits ne soient pas plus longs !!

Las Mariposas, opposantes au régime de Trujillo

 

 
 
A bientôt pour une nouvelle émission des Bibliomaniacs !
 
 

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