Aide-moi si tu peux – Jérôme Attal

Robert Laffont, 2015, 265 pages

 

La première phrase :
Au départ, quand j’ai su que j’entrais dans la profession, je me voyais déjà intervenir contre tout ce qui me ruine le moral : l’abruti d’automobiliste qui sur une autoroute se croit malin en vous doublant par la droite, le cycliste qui jaillit sur un trottoir en contresens ou ne respecte pas les feux tricolores, le piéton qui crache par terre comme si la voie publique méritait qu’on la provoque en duel ou la bande de bipèdes de sexe masculin qui ne peut pas s’empêcher de faire une réflexion graveleuse au passage d’une jolie femme.

 

La quatrième de couverture :
Stéphane Caglia n’est pas un flic comme les autres. Pour échapper à la violence urbaine qui est son quotidien, il se réfugie dans les années 80 – les années de son enfance. Traqué par un tueur à la solde d’une mystérieuse secte, il va devoir enquêter sur la disparition d’une jeune fille, liée à une série de crimes. Tamara, dix-sept ans, postait sur Internet des reprises de chansons des Beatles. Là est peut-être la clé de l’énigme…

 

L’opinion de Miss Léo :

 

Help me if you can…

 

Les amateurs de musique pop auront sans doute reconnu l’allusion (qui m’a également fait penser au titre du film de Spielberg, lequel n’a absolument rien à voir avec le schmilblick). Pour les autres : il faut de toute urgence revoir vos classiques !

 

Voici quoi qu’il en soit un bien sympathique roman, né de la plume de Jérôme Attal, un écrivain et parolier français dont je n’avais jamais entendu parler jusqu’à ce jour, bien que ce dernier semble déjà bénéficier d’une certaine renommée. Très distrayant, drôle la plupart du temps, Aide-moi si tu peux séduit par son ton décalé, ainsi que par son côté madeleine de Proust. Le personnage principal, à peine plus âgé que moi, n’en finit pas de se remémorer les flamboyantes années 80 de son enfance, et les très nombreuses références qui émaillent le récit jouent sur la fibre nostalgique, créant ainsi une connivence immédiate avec le lecteur.

 

Stéphane Caglia n’est vraiment pas un flic comme les autres. Constamment irrité (pour ne pas dire exaspéré) par l’impolitesse et le manque d’éducation de ses contemporains, durablement marqué à l’adolescence par la mort prématurée de son père (un homme très courageux), le jeune enquêteur évolue dans une sorte d’univers mental parallèle, et ne rate pas une occasion d’évoquer ses souvenirs d’une époque révolue, qu’il n’a semble-t-il jamais quittée.

 
“Je peux vous demander quelque chose, Prudence ? Vous êtes de quelle année ?
  – 1983.
  – Formidable, m’écriai-je. L’année de la sortie mondiale du clip de “Thriller”, et donc, de sa première diffusion en France !”
(page 81)

 

Mon idole de jeunesse

 

Voitures à friction, improbables chanteurs has-been façon Bonnie Tyler ou François Feldman, chefs d’oeuvre impérissables du Septième Art, allant de Karaté Kid à Highlander en passant par The Breakfast Club, sans oublier les emblématiques jeux électroniques Game & Watch… Tout y passe ! Stéphane ne jure que par le Seven Up et le Malibu, et arbore fièrement son T-shirt Albator, tandis que retentit la sonnerie “Boule de Flipper” de son téléphone portable.

 

 

Le lecteur évolue donc en terrain familier, et je dois dire qu’il est bien difficile de ne pas se prendre au jeu d’une intrigue policière par ailleurs correctement menée, dont l’entrée en matière a le mérite d’être efficace (j’ai pour ma part été très agréablement surprise par les premières pages). La plume de l’auteur est agréable, et la gouaille du narrateur séduit. Stéphane Caglia joue les durs, ce qui dissimule une personnalité névrosée, guère en phase avec son environnement. Il règne une incompréhension mutuelle entre Stéphane et sa collègue rouquine anglaise Prudence Sparks, laquelle se fiche éperdument des années 80 (allez savoir pourquoi). Derrière l’humour potache se cache une vraie sensibilité, et j’ai apprécié le côté lunaire de certains personnages, donnant lieu à des situations cocasses et des dialogues parfois surréalistes. Il se dégage par moments une certaine forme de poésie décalée de ce roman attachant et teinté de nostalgie, dont l’histoire se déroule à deux pas de chez moi (dans les Hauts-de-Seine et les Yvelines).

 

Bien sûr, on frôle souvent la caricature, et les références se font parfois trop insistantes. Si j’ai aimé suivre le déroulement de l’enquête sur la disparition de Tamara, lycéenne spécialisée dans les reprises des Beatles sur Internet, j’ai en revanche été moins convaincue par les scènes dans lesquelles le policier se retrouve confronté à des truands, tout droit sortis de la mystérieuse organisation criminelle du Souterrain stellaire (dont la nature et les objectifs demeurent assez mystérieux dans le roman). Il ne s’agit bien sûr que d’un prétexte visant à dérouler le fil des souvenirs d’enfance du narrateur, mais j’ai trouvé que cela n’apportait pas grand chose au récit. Ces quelques réserves mises à part, Aide-moi si tu peux demeure néanmoins une lecture très agréable, portée par le style dynamique de Jérôme Attal, dont je lirai volontiers les précédents romans.

 

Un roman dynamique et plein d’humour, qui vous fera passer un très agréable moment. Vivent les 80’s !
 
 
Livre lu et chroniqué dans le cadre d’un partenariat avec les éditions Robert Laffont.
 

6 thoughts on “Aide-moi si tu peux – Jérôme Attal

  1. help!
    I need a little help from my frends!
    Les Beatles c'est quand même années 60, plus mon truc d'ailleurs.
    Mais c'est que ce roman a l'air franchement sympa, ça va être difficile de résister si l'auteur est au salon de Châteauroux…
    Oui, je crois que tu as vu mon billet de cette semaine, je présentais deux de ses romans.

  2. Moi je serai moins lyrique que toi car je le trouve quand même maladroit, surtout au début, ça ne tient qu'à un fil, il nous perd avec son histoire de Souterrain stellaire, les références aux années 80, trop c'est trop (je sors de Baïnes où il en était aussi question)… Les gendarmes qui fument du shit avec le héros pour trouver des "pistes", euh…cocasse certes mais pas franchement crédible ! J'en suis à la moitié, je vais le finir demain et j'en parlerai la semaine prochaine ! 😉

  3. Ca a l'air sympa et d'être un livre qui change. Ce sont les références aux Beatles et la couverture qui m'ont attirée en premier, je dois dire que les références aux années 80, étant donné que je n'ai aucun souvenir de cette décennie, ça risque de me passer un peu au dessus, mais pourquoi pas !

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