Magic Time – Doug Marlette

Titre original : Magic Time
Traduction (américain) : Karine Lalechère
Le Cherche-Midi, 2006/2016, 671 pages

 

La première phrase :
Carter Ransom se réveilla, pelotonné à l’arrière de la Mercury Grand Marquis de sa soeur.

 

L’histoire :
(résumé de l’éditeur)
1965. Alors que le Mouvement des Droits Civiques porté par Martin Luther King s’étend dans tous les États-Unis, le pays a les yeux fixés sur Troy, une petite localité du Mississippi. Quatre jeunes activistes y ont péri dans l’incendie d’une église. Deux membres du Ku Klux Klan sont arrêtés et condamnés à perpétuité.1990. L’un des condamnés libère sa conscience en désignant le vrai responsable du crime. Un nouveau procès se prépare donc à Troy. De retour dans sa ville natale, Carter Ransom, ancien sympathisant dans la lutte pour les droits civiques et journaliste au New York Examiner, est aux avant-postes. Son premier amour, Sarah Solomon, faisait partie des victimes et son père, le tout-puissant juge Mitchell Ransom, avait conduit le premier procès. Carter veut faire toute la lumière sur cette période qui l’a marqué à jamais.

 

L’opinion de Miss Léo :

 

Rien de tel qu’un bon gros pavé américain pour tromper l’attente en ces ultimes et oisives journées de congé maternité prénatal ! Les éditions du Cherche Midi ont eu la bonne idée de faire traduire ce roman de Doug Marlette, publié aux Etats-Unis il y a tout juste dix ans. Le résumé me semblait particulièrement prometteur, mais j’ai surtout été convaincue par l’avis positif de Keisha, blogueuse éclectique aux goûts décidément très sûrs.Ne vous laissez surtout pas rebuter par le nombre de pages. Magic Time est un roman dense et complexe, qui bénéficie d’une intrigue solide et admirablement construite, ayant pour toile de fond la ségrégation raciale et la lutte pour la défense des Droits Civiques (thème que je connais encore assez mal, mais qui m’intéresse évidemment beaucoup). L’auteur jongle habilement entre deux époques, et nous invite à découvrir de nombreux personnages, humains et attachants pour la plupart. Carter Ransom sert de trait d’union entre les principaux protagonistes du drame, dont il est à la fois l’acteur et le témoin.
 
Doug Marlette s’attache à recréer l’ambiance poisseuse des années 60. Confronté à la violence des états du Sud et à la veulerie humaine, entre racisme ordinaire et démonstrations de force du Ku Klux Klan, Carter découvre le courage et l’abnégation d’un petit groupe de jeunes gens de son âge (la vingtaine), qui prennent une part active au mouvement initié par Martin Luther King, et luttent sans relâche pour défendre leur convictions, quitte à subir les déferlements de folie meurtrière de leurs ennemis. On sait dès le début que plusieurs d’entre eux y laisseront la vie, dans l’incendie de l’église de Shiloh… La réouverture du procès en 1990 remue des souvenirs douloureux, et conduit Carter à reconsidérer son point de vue sur les sombres événements d’autrefois, qui trouvent encore une résonance trente ans après (les fantômes du passé ont la vie dure). Soupçons, corruption et enjeux politiques sont au coeur d’un récit riche et poignant, mêlant habilement personnages fictifs et réalité historique.
 
Instructif sans être lourdement démonstratif, Magic Time évolue loin des stéréotypes, et propose qui plus est une véritable intrigue romanesque : des liens amicaux et amoureux se nouent, des drames familiaux sont révélés au grand jour, de jeunes adultes doivent apprendre à porter le deuil de leurs amis trop vite disparus… Les situations sont complexes, souvent tragiques, mais l’auteur parvient malgré tout à ménager des moments de légèreté et de détente, ce qui rend le roman particulièrement savoureux. L’alternance parfaitement maîtrisée de deux fils narratifs est ici une excellente idée : les deux époques se répondent mutuellement, ce qui permet de combler progressivement les vides de l’intrigue, tout en assistant à l’évolution des personnages.
 
Pour résumer : Magic Time est un excellent roman, que je recommande chaleureusement ! Il ne s’agit pas à proprement parler d’un thriller, mais il y a tout de même du suspense, et on ne voit pas le temps passer (chaque page est un régal). La traduction est de qualité, ce qui ne gâte rien. Je trouve tout à fait regrettable que Doug Marlette soit décédé dans un accident de voiture l’année suivant la publication du livre…
 
Un roman passionnant  ! 
Je ne suis pas loin du coup de coeur…
 
Merci Solène pour cette jolie découverte.

 

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Encore un pavé de janvier pour Bianca.
Je suis au taquet !