Nager sans se mouiller – Carlos Salem

Titre original : Matar y guardar la ropa
Traduction : Danielle Schramm
Editions Babel Noir Actes Sud, 2008, 296 pages

 
La première phrase :

Les miroirs de l’ascenseur nous répètent à l’infini et créent une multitude de clones à partir des quatre personnes qui l’occupent.

 

L’histoire :
Juan Perez Perez mène une double vie. A bientôt quarante ans, ce père de famille divorcé se fait passer auprès des siens pour un insignifiant représentant en papier hygiénique, quand il est en réalité un redoutable tueur à gages au service d’une mystérieuse Entreprise. Nom de code : Numéro Trois. Passé maître dans l’art du déguisement, Numéro Trois abat ses victimes avec efficacité et sans le moindre scrupule.
Alors qu’il se prépare à passer quelques jours de vacances sur la côte espagnole en compagnie de ses deux enfants, Juanito se voit confier par l’Entreprise un contrat de dernière minute, qu’il accepte sans enthousiasme. Sa mission : surveiller une future cible dans un camping naturiste, où un emplacement lui a d’ores et déjà été réservé. Quelle n’est pas sa surprise lorsqu’il réalise que son ex-femme Leticia et son nouvel amant occupent l’emplacement voisin du sien ! La coïncidence est presque trop grosse pour être vraie… Cette rencontre sera la première d’une longue série, qui verra la réapparition inattendue de plusieurs vieilles connaissances, tandis qu’une mystérieuse et séduisante jeune femme attire Juan dans ses filets. Le petit univers bien ordonné de Numéro Trois se voit alors sérieusement ébranlé. Et si Juanito était la cible ?

 

L’opinion de Miss Léo :

 

Parmi la myriade d’ouvrages proposés par Ys pour son désormais célèbre challenge Les 12 d’Ys, la catégorie “Auteurs latino-américains” était pour moi la plus problématique. Curieusement, l’Amérique du Sud n’est pas un continent qui m’attire énormément, et je n’étais pas du tout sûre d’adhérer à l’univers des douze auteurs proposés. Certains d’entre eux me tentaient néanmoins plus que d’autres, et c’est devant les rayonnages de la librairie que j’effectuai mon choix, après bien des tergiversations et moult feuilletages. Je me suis finalement décidée pour le deuxième roman de l’argentin Carlos Salem, essentiellement parce qu’il s’agissait d’un livre relativement court (je deviens paresseuse), édité chez Actes Sud (une valeur sûre), que la quatrième de couverture qualifiait de “roman noir délirant, burlesque et poétique” (comme souvent, ma sélection s’est opérée selon des critères parfaitement pertinents).

 

Je l’ai commencé avec une petite pointe d’appréhension, mais je reconnais avoir été agréablement surprise par une lecture qui se révéla finalement plutôt plaisante, à défaut d’être enthousiasmante.

 

“- Toi, ton problème, c’est que tu veux nager sans te mouiller, me disait souvent le vieux Numéro Trois.
Il m’aimait bien, à sa façon. Mais c’était une façon de merde.” (page 29)

 

Nager sans se mouiller est une comédie policière délirante, rédigée à la première personne, dans laquelle la violence, omniprésente, est atténuée par la vision burlesque qu’en donne l’auteur. Carlos Salem est un écrivain atypique, dont l’univers original et décalé ravira les amateurs de polars “hors-norme”. J’ai un peu décroché lors de certaines scènes par trop caricaturales, pour ne pas dire grotesques, mais c’est aussi ce qui fait le charme de ce roman non dénué d’humour, lequel nous propose en prime des personnages plus profonds qu’il n’y parait au premier abord.

 

Juanito est un tueur à gages attachant, en proie au doute, et de toute évidence un peu paumé, malgré son apparente maîtrise. Les événements le conduisent à s’interroger sur sa vie, son métier, son avenir, ses rapports aux femmes et au sexe, et finissent par déclencher une profonde crise identitaire. Est également évoqué le thème de la transmission et de la paternité, à travers les relations qu’entretient Juan avec ses deux enfants. Le roman nous réserve d’ailleurs quelques belles scènes familiales, subtiles et sensibles, qui détonent un peu dans cet univers sombre et totalement déjanté. Les personnages secondaires sont quant à eux parfaitement improbables, mais n’en demeurent pas moins savoureux. Je n’en dis pas plus : mieux vaut les découvrir par soi-même (dans l’hypothèse où vous vous laisseriez tenter par mon billet) !

 

Impression générale plutôt positive, donc, mais je suis malgré tout restée sur ma faim. La deuxième partie du roman est malheureusement trop prévisible, et n’échappe pas aux clichés. Il s’agit probablement d’une volonté consciente de l’auteur, mais il n’empêche que je n’ai pas été séduite par le dénouement, fade et assez convenu. Reste tout de même un joli roman, qui fait figure d’OVNI dans le petit monde très codifié du polar. Il n’est pas impossible que je lise un jour d’autres ouvrages de Carlos Salem (qui est effectivement argentin, bien qu’il réside depuis plusieurs années en Espagne, où se déroule d’ailleurs l’intrigue du présent opus).

 

Un petit roman noir burlesque inégal, pas toujours palpitant, mais néanmoins sympathique.

 

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Ce billet marque ma dixième participation aux 12 d’Ys.

 

Manquent encore deux catégories pour boucler le challenge : je prévois de lire Le Roi Transparent et Le Lys dans la Vallée.
 

 
Je complète également une nouvelle case “Sport/Loisir” du challenge Petit Bac d’Enna.

 

5 thoughts on “Nager sans se mouiller – Carlos Salem

  1. Bon finalement, ça ne s'est pas trop mal passé. Ça n'était pas évident car l'humour, surtout ce genre-là, assez macho, n'est pas forcément partagé par tous…

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