Ordinary people – Diana Evans


Titre original : Ordinary people
Traduction (anglais) : Karine Guerre
Editions Globe, 2019, 378 pages

Livre lu dans le cadre du Prix Elle 2020.

La première phrase :

Pour saluer l’élection d’Obama, les frères Wiley organisèrent une grande réception chez eux, dans le sud-est de Londres. Ils vivaient près du Crystal Palace Park, où l’émetteur du centre de radiodiffusion s’élève vers le ciel comme une petite Tour Eiffel, austère et métallique le jour, rouge et illuminée la nuit, dominant de sa hauteur les quartiers voisins, les comtés limitrophes de la capitale et, dans le parc étendu à ses pieds, les restes de l’ancien royaume de verre – le lac, le labyrinthe, les statues grecques brisées, les lions de pierre érodés et les sculptures de dinosaures érigées par les scientifiques d’une époque révolue.


L’histoire :

Londres, 2008. Barack Obama vient d’être élu président des Etats-Unis. Deux couples de quadragénaires banlieusards avec enfants se débattent pour concilier leurs aspirations personnelles avec les multiples aspects de leurs vies familiale et professionnelle. Leur union résistera-t-elle aux exigences de la vie quotidienne ?


L’opinion de Miss Léo :


Quel roman !

De très loin le meilleur livre de la sélection de novembre du Grand Prix des Lectrices Elle 2020, auquel j’ai la chance de participer cette année. Diana Evans dissèque la vie intime et familiale de deux couples avec enfants, et touche à une forme de perfection sublime, alliance parfaite de la forme et du fond.

Je me suis totalement reconnue dans les interrogations de ces presque quadragénaires, luttant pour concilier parentalité, vie professionnelle, vie sexuelle et épanouissement personnel en milieu urbain. Ni jeunes, ni vieux, enfermés dans une routine parfois dévastatrice, tous jettent un regard nostalgique sur les opportunités manquées, et envisagent leur avenir avec un optimisme tout relatif. Voici venue l’heure des premiers bilans. Quelle orientation choisir pour les années à venir ? S’étioler durablement, ou changer de vie ? Se satisfaire de ce qu’on a, ou tout remettre à plat pour repartir sur de nouvelles bases ?

Ordinary people est un beau roman, ancré dans un contexte socio-économique très actuel. Il débute en 2008, au lendemain de l’élection de Barack Obama, et s’achève avec la mort de Michael Jackson. La romancière anglo-nigérianne traite de problématiques aussi diverses que le déclassement de la classe moyenne, reléguée dans des banlieues plus ou moins sordides, l’éducation des enfants, le métissage ou la mixité culturelle. Le livre repose sur des personnages solidement incarnés, remarquablement croqués par l’auteur. Celle-ci plonge dans la psyché des quatre principaux protagonistes avec une acuité et une sensibilité impressionnantes (j’en suis restée pantoise). On ressent beaucoup d’empathie pour ces hommes et ces femmes, en particulier pour Melissa, qui se débat quotidiennement pour faire face aux difficultés liées à l’irruption d’un enfant dans la vie de couple, tout en gérant les pressions générées par son environnement social.

Ordinary people est un ouvrage très ambitieux, qui brosse avec profondeur et légèreté le portrait d’une époque. Le bandeau évoque Dickens et Tolstoï, et pour une fois, la comparaison ne me paraît pas totalement usurpée (on pourrait même ajouter Balzac, pour le côté comédie humaine). Le nombre de pages est assez conséquent, mais on ne s’ennuie jamais, tant la prose de Diana Evans se révèle énergique et inventive. L’histoire du Crystal Palace sert de fil conducteur au récit, et lui donne un cadre, de même que les nombreuses références musicales, ancrées dans leur époque. Certains reprochent au roman “son manque d’action”, mais il s’agit en réalité d’un texte très dense, bien moins anodin qu’il n’y paraît, habité par un souffle quasi-mystique. On y trouve même une dimension fantastique (la maison hantée symbolise les doutes et les angoisses de Melissa, prise au piège de sa vie familiale).

Pour résumer : regard acéré, décor bien planté, finesse d’analyse, justesse psychologique, très belle écriture.
Diana Evans est une excellente conteuse, et son roman est formidable.



J’aime, et je recommande !





9 thoughts on “Ordinary people – Diana Evans

  1. yeah! je ne participerai pas au prochain Bibliomaniacs, mais je vais néanmoins vous accompagner dans cette lecture, et je suis ravie de lire ton avis très positif!

    1. Malheureusement, il n’a pas passé la sélection… Je comprends qu’on puisse ne pas accrocher, mais pour ma part, je l’ai trouvé passionnant, et très pertinent.

    1. Super ! J’espère qu’il te plaira (certaines jurées du Prix Elle n’ont pas accroché, ce que je peux comprendre).

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