Traduction : Jean Esch
Editions du Seuil, Points, 1995, 418 pages
Les premières phrases :
A cause de la canicule, on avait laissé les portes ouvertes. En gardant les yeux fixés sur l’entrée, on pouvait voir monter les vagues de chaleur dans l’allée de pierres humides, juste derrière le seuil.
L’histoire :
Mark Manship, conservateur au Met, apporte la touche finale à ce qui devrait être le point culminant de sa carrière, à savoir l’organisation d’une gigantesque exposition entièrement consacrée à l’oeuvre de Sandro Botticelli. Il parcourt l’Europe, afin de réunir et d’acquérir les oeuvres qu’il souhaite voir exposées à cette occasion. Hélas ! Les toiles convoitées par Manship sont sauvagement lacérées à coups de couteau. L’auteur de ces méfaits semble s’acharner plus particulièrement sur les yeux des personnages. Dans le même temps, des femmes disparaissent, et sont retrouvées mortes, les yeux évidés. Ces événements n’entament en rien la détermination de Manship, fermement décidé à mener à bien son projet quoi qu’il arrive
L’opinion de Miss Léo :
Encore un roman acheté sur une impulsion, il y a de cela plusieurs mois. J’ai décidé de le sortir de ma PAL pour inaugurer le challenge
L’art dans tous ses états, organisé par la miss
Shelbylee. Premier constat : l’intrigue est originale et plutôt bien construite.
Herbert Lieberman crée un univers singulier, dans lequel rôde un tueur en série glacial et atypique, au modus operandi particulièrement terrifiant. Non content de lacérer des toiles de maître à coups de kriss, ce dernier recrée dans son sous-sol des scènes issus de tableaux de Botticelli, en y faisant figurer des sculptures façonnées à partir de la peau et du corps de ses victimes, façon Mako Moulages. Le lecteur est saisi d’effroi à la découverte de ces dioramas morbides, dont la fabrication nous est minutieusement décrite.Le reste du roman est construit autour du personnage de
Mark Manship, dont les pérégrinations nous mèneront d’Istanbul à New-York, en passant par Londres, Paris, Munich, Rome et surtout Florence, où Manship fera la connaissance d’
Isobel Cattaneo, descendante de la fameuse Simonetta Vespucci, célèbre modèle du sieur Botticelli himself. L’Italie est d’ailleurs joliment évoquée par l’auteur, dans les quelques chapitres qui lui sont consacrés.
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Simonetta Vespucci (vers 1476) |
L’intrigue policière est finalement assez secondaire. Ce que j’ai aimé dans ce roman ? Tous les passages ayant trait à la préparation de l’exposition consacrée à Botticelli ! Des efforts de Manship pour identifier et acquérir les oeuvres du maître florentin jusqu’à leur installation dans les salles du Metropolitan Museum, en passant par la restauration des toiles endommagées et l’élaboration du catalogue de l’exposition. Lieberman nous entraîne dans les coulisses de l’événement, et l’on suit avec intérêt le déroulement des opérations : ventes aux enchères, âpres négociations avec les possesseurs des toiles tant convoitées, choix des lumières, réflexion sur la scénographie, rencontre avec les mécènes et autres généreux donateurs, communication avec la presse, vernissage… Tout cela est passionnant ! Il est par ailleurs fait référence à divers tableaux de Botticelli, ainsi qu’à une série d’esquisses préparatoires que le peintre aurait réalisées pour la Madone Chigi (ou Madone de l’Eucharistie). J’ignore quelle est la part de vérité dans tout cela.
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La madone de l’Eucharistie (vers 1470) |
La fille aux yeux de Botticelli laisse cependant un goût d’inachevé. Si j’ai été fascinée par la partie liée à l’art, je me suis en revanche un peu ennuyée lorsque l’auteur faisait référence aux groupuscules fascistes italiens, avec lesquels le tueur et la belle Isobel semblent entretenir des liens étroits. J’ai trouvé que cela ralentissait quelque peu le rythme de l’intrigue. Autre bémol : le ton est assez froid, et laisse finalement assez peu de place au mystère et à l’empathie. On peut y voir un atout, se dire que Lieberman a refusé de céder aux exigences commerciales du genre pour conduire le récit à sa façon. Il n’empêche que l’intérêt retombe nettement dans la dernière partie, et que le dénouement est tout sauf palpitant.
Malgré quelques longueurs, je note cependant le nom de cet auteur, dont j’ai envie de découvrir d’autres textes.Un roman imparfait mais stimulant, au thème original et intéressant.
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Enfin une première participation au challenge L’art dans tous ses états de Shelbylee !
Sans oublier le challenge Petit Bac d’Enna, catégorie Personnage célèbre.
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je le note, j'aime bien l'idée de l'intrigue 🙂
Cela ressemble à Da Vinci Code mais côté peinture, non ? bises
Ah non, pas du tout ! J'ai détesté Da Vinci Code, que j'ai trouvé pompeux, racoleur, mal écrit et mal construit. Celui-ci est nettement meilleur et surtout beaucoup moins prétentieux, bien que je ne sois pas totalement emballée non plus.
Désolée pour la violence de ma réponse. 😉
Bises.
Comment tu n'as pas cru qu'Audrey Tautou (je ne me souviens plus du nom du personnage) était la descendante de bippppp dans le Da Vinci ??? ^^ Bon le Lieberman me tente pour tous les aspects que tu as décrits. C'est marqué Botticelli donc forcément un jour je le lirai !
On a tous nos petites marottes !
Pour répondre à ta question : si, j'y ai cru à fond.