Miel et vin – Myriam Chirousse

Editions Buchet-Chastel, Le Livre de Poche, 2009, 509 pages

 
Les premières phrases :

Je veux vivre.
Il le faut absolument, car mon rôle dans cette histoire est trop important. Si je ne vis pas, comment Charles aura-t-il la révélation qui changera sa vie ? Comment Judith sera-t-elle invitée à Vaillac par le vieux comte ?
 
L’histoire :

Judith et Charles. Une orpheline et un bâtard. Recueillie par une famille d’aristocrates périgourdins, Judith de Monterlant rencontre pour la première fois Charles de l’Eperay au mariage (arrangé) de sa soeur Hélène. C’est le coup de foudre. Les deux amants doivent néanmoins se séparer. Charles épouse la cause révolutionnaire, tandis que Judith convole en justes noces avec le parlementaire Philippe de Marbourg. Tout ce petit monde se retrouve à Paris en 1789…

 

L’opinion de Miss Léo :

 

Il ne vous aura pas échappé que je suis actuellement dans ma période “Histoire”, comme en témoigne mon inscription enthousiaste au challenge Louis XIV d’Eliza. J’ai envie de tout lire, aussi bien des ouvrages théoriques que des romans ou des biographies. Un objectif bien utopique, d’autant plus irréaliste que toutes les périodes (ou presque) m’intéressent, du Moyen-Age à la deuxième Guerre Mondiale, en passant par l’Ancien Régime et l’Angleterre victorienne. Dernière lubie en date : la Révolution Française, que j’avais depuis longtemps délaissée, après l’avoir vue et revue sur les bancs de l’école, au point de ressentir une certaine lassitude. J’étais très tentée par Miel et vin (joli titre), un roman dont j’avais lu beaucoup de bien sur la blogosphère, présenté comme une sublime histoire d’amour sur fond de Terreur et de Révolution.

 

Un seul mot me vient à l’esprit : bof (ça, c’est de la critique).

 

Ce premier roman, quoique imparfait, possède néanmoins plusieurs aspects sympathiques. Judith est une héroïne attachante, têtue et passionnée, ouverte d’esprit, rousse qui plus est (tiens, ça me fait penser au dernier Pixar). L’arrière-plan historique est plutôt convaincant, et bien intégré au récit. La Révolution est subtilement évoquée, et nous n’assistons qu’aux événements dont Judith a elle-même été le témoin (Miel et Vin est avant tout une romance, et suit pas à pas les traces de son héroïne). Le lecteur s’amusera de retrouver parmi les fréquentations de la jeune femme Camille Desmoulins et Olympe de Gouges (cette chère Olympe, qui donna son nom au premier lycée du 93 où j’eus l’heur d’enseigner), qui payeront tous deux au prix fort la mise en place de la Terreur en 1793. C’est dans une France en guerre contre elle-même et contre ses voisins européens que Judith, relativement épargnée dans un premier temps, se verra finalement contrainte de fuir la capitale pour retrouver son Périgord natal.

 

Ce que j’ai le plus aimé dans Miel et vin, ce sont les nombreuses allusions au progrès scientifiques de l’époque (siècle des Lumières oblige). Judith est élevée par son oncle Guillaume de Salerac, qui est sans nul doute le personnage le plus intéressant et le plus sympathique du roman. Tour à tour herboriste, pharmacien, médecin et physicien, ce savant fou à l’esprit bouillonnant et enthousiaste construit des aérostats dans son jardin, et contribue à illustrer certaines planches de l’Encyclopédie. Il refait le monde en compagnie de son ami Gaëtan, libraire érudit de son état, et transmet sa passion à Judith, dont la curiosité se révélera sans limites. Je ne peux évidemment pas clore ce chapitre sans évoquer l’autre grande innovation technologique de cette fin de XVIIIème siècle, je veux bien sûr parler de l’inénarrable guillotine ! Une sublime invention bien française, accueillie comme une aubaine en cette merveilleuse année 1792, où l’on décapitait déjà à tour de bras.

 

Mais, me direz-vous, pourquoi ne suis-je pas plus enthousiaste, malgré toutes les qualités sus-citées ?

 

Le principal problème du livre réside selon moi dans l’histoire d’amour de Judith et Charles, qui n’est guère palpitante. Je n’y ai pas cru un instant, même si j’ai aimé le fait que Judith prenne son destin en main, et montre une certaine force de caractère dans l’adversité. Il semblerait que la romance, même historique, ne soit pas mon genre de prédilection ! Le roman pose également en fil rouge la question du mystère de la naissance et des origines de Judith. Hélas, on devine bien vite la clé de l’énigme, et les cent dernières pages traînent en longueur (je les ai tournées machinalement, sans me passionner pour le destin des personnages).

 

Reste donc un roman plutôt bien écrit, vite lu sans être particulièrement enthousiasmant. Myriam Chirousse réussit néanmoins à créer une ambiance bucolique rassérénante : les personnages passent leur temps à boire et à manger sous le soleil périgourdin, et l’on appréciera les nombreuses métaphores fruitées, qui donnent un côté très sensuel à certaines scènes. La narration se veut originale, l’histoire étant racontée par un futur bébé à naître. Le procédé retombe malheureusement comme un soufflé, et l’on ne voit pas bien où l’auteur voulait en venir. N’oublions pas qu’il ne s’agit là que d’un premier roman, ce qui peut expliquer les quelques imperfections !

 

Pour l’anecdote, sachez que Myriam Chirousse est également la traductrice officielle de l’oeuvre de Rosa Montero, auteur dont j’ai prévu de lire Le Roi transparent pour Les 12 d’Ys. J’ai entendu dire que la traduction était excellente !

 

Une lecture détente, parfaite pour les vacances, mais pas indispensable. Je suis tout de même un peu déçue.
 

Découvrez des avis très positifs chez Lou, Syl, Clarabel, Adalana.
Minou n’est quant à elle guère enthousiaste.

 

5 thoughts on “Miel et vin – Myriam Chirousse

  1. C'était parfait pour mes vacances de l'année dernière. J'ai été beaucoup moins critique que toi. J'ai dévoré le livre rapidement, aimant le contexte historique, les personnages et la romance.
    Biz

  2. J'ai le même ressenti que toi : bof. Peut-être parce que j'en attendais trop. Certainement parce que je l'ai lu trop tard en tout cas : j'aurais adoré ce roman au moment de sa parution, mais il m'en faut aujourd'hui plus. Si j'ai admiré la reconstitution historique et l'habilité à nous plonger dans ce 18e siècle finissant, je suis aussi restée insensible à la passion des amants, presque peu présente finalement et bien froide (comme tu l'as dit dans ton article, on n'y croit pas vraiment…) C'est dommage que l'auteure ait voulu développer trop de choses et s'y soit finalement un peu perdue (notamment avec ce prologue qui retombe comme un soufflé, sans transition ni explications)
    J'espère pouvoir te contredire sur la prochaine lecture où tu m'as précédée, parce que cette fois, je ne peux dire mieux que toi…

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