Lecture commune avec Adalana et Shelbylee
Titre original : Yogisha X no Kenshin
Traduction (japonais) : Sophie Refle
Babel noir, Actes Sud, 2005 (2011), 314 pages
La première phrase :
Comme à son habitude, Ishigami sortit de chez lui à sept heures trente-cinq.
L’histoire :
“- Qu’est-ce qui est le plus difficile : élaborer un problème que personne ne peut résoudre, ou résoudre ce problème ? En supposant que la réponse existe nécessairement. Tu ne trouves pas l’idée intéressante ?
– Très, répondit Ishigami en regardant Yukawa. Je vais y réfléchir.
Yukawa hocha la tête et lui tourna le dos. Il continua à marcher vers la rue.” (page 135)
Ishigami est un personnage très touchant, malgré sa froideur. Peut-être ai-je un faible pour les individus brillants, capables tout à la fois d’une grande rigueur et d’une capacité d’invention sans limite… Il n’empêche que le professeur se révèle également capable de sentiments exacerbés, bien que sa façon de les exprimer soit pour le moins curieuse. Cette incapacité à communiquer normalement, combinée à une intelligence hors du commun, rappelle les symptômes du syndrome d’Asperger.
Yukawa apporte quant à lui un peu d’humanité à un roman qui en est par ailleurs totalement dépourvu (c’est l’un des principaux reproches que l’on peut faire à l’auteur). Il incarne un rationalisme sain et équilibré, par opposition à la folie de son alter-ego. C’est le seul personnage un tant soit peu sympathique !
Yasuko se révèle en revanche creuse et peu attachante, et l’on se moque pas mal de découvrir le sort qui lui sera finalement réservé. On se demande comment Ishigami peut être attiré par cette dinde, certes jolie, mais totalement inintéressante sur le plan intellectuel ! Je serais curieuse de savoir si les personnages féminins sont aussi peu travaillés dans les autres romans de l’auteur, ou bien s’il s’agit d’une faiblesse volontaire, permettant de recentrer le récit sur l’affrontement des deux scientifiques.
“Kusanagi le salua d’un mouvement de tête et revint sur ses pas. Ishigami le regarda s’éloigner en ressentant une inquiétude indéfinissable.
Elle ressemblait à celle qu’il éprouvait lorsqu’une formule qu’il croyait parfaite se déformait progressivement en une inconnue.” (page 166)
Je n’ai pas grand chose à ajouter en ce qui concerne la forme : le style est simple et rigoureux, à l’image de l’intrigue (du moins en ce qui concerne la traduction). On oublierait presque que l’action se déroule au Japon, en dehors de quelques passages faisant référence à des spécificités locales, comme les tatamis et les portes coulissantes en papier, ou encore la consommation quotidienne de bentos. J’ai cependant relevé quelques remarques intéressantes sur l’enseignement des mathématiques, ainsi que sur le système scolaire japonais. Tout cela est loin d’être stupide.
On peut par ailleurs regretter que le roman traîne un peu en longueur dans la dernière partie. La conclusion tarde à arriver, et j’ai ressenti une petite baisse d’intérêt, heureusement compensée par les révélations finales, plutôt bien amenées au cours d’un dénouement magistral et riche en émotions. Je n’aurai finalement pas mis bien longtemps à lire ce texte, l’auteur ayant réussi à me captiver d’un bout à l’autre. Je songe d’ailleurs à me procurer assez rapidement ses deux autres ouvrages, La maison où je suis mort autrefois et Un café maison.
Un dernier mot concernant la couverture, assez belle dans son genre (un homme masqué protégeant une jeune femme démunie de son ombrelle), mais qui met pourtant très mal à l’aise quand on la regarde d’un peu plus près. Merci Babel Noir !
Un très bon roman policier, à l’intrigue originale et bien ficelée. Fascinant, malgré quelques longueurs.
Première participation au superbe Challenge Ecrivains Japonais, organisé chez Adalana.
Ce billet compta également pour le challenge Dragon 2012 de Catherine, du blog La Culture se partage.
Cette couverture est originale mais effrayante ! Livre noté pour me donner des idées…
Ca se lit vite et bien ! D'accord avec toi concernant la couverture.
Je prends ton lien !
Je suis contente que tu aies apprécié cette découverte 🙂
Rendez-vous avec Murakami en février !
Un auteur qu'on commence à bien voir sur les blogs…
Je l'avais vaguement repéré en librairie, mais j'aurais hésité à l'acheter si Adalana ne l'avait pas mis au programme de son challenge.
Étrange histoire. Je mets ce titre sur ma liste!
Etrange, et pourtant limpide ! Un auteur à découvrir.
"La maison où je suis mort autrefois" est très bien aussi.
Il faut que je le lise ! Merci de ta visite.
J'avais juste compris pour l'alibi mais je n'avais pas compris comment il avait fait pour le corps.
Moi aussi Yasuko m'a énervée par son aveuglement. J'ai lu La maison où je suis mort autrefois et l'héroïne est quand même plus complexe.
Tant mieux ! Je le lirai un de ces jours…
Bon, encore un à découvrir donc… Pouf, je te jure !
Nous n'en sortirons donc jamais ?!
j'ai aussi découvert cet auteur grâce au challenge et ce livre semble bien intéressant
j'ai choisi "la maison àù je suis mort autrefois", superbe intrigue en huis-clos dans une maison désaffectée, une belle enquête que j'ai présentée sur mon blog aujourd'hui
Tu me donnes très envie de le lire !
Lien noté, Miss Léo, merci ! C'est marrant, beaucoup de mes participants au Dragon 2012 lisent cet auteur en ce mois de janvier car ils participent aussi au challenge Auteurs japonais ! Je l'ai d'ailleurs lu aussi, mais pas ce titre, dommage car j'aurais fait la lecture commune avec vous.
Eh oui, nous lisons tous la même chose en même temps ! Cela manque un peu de variété, mais ces lectures communes ont tout de même un côté bien sympathique.
Très alléchant ! J'ai justement La maison où je suis mort autrefois dans ma PAL. A sortir d'urgence (ce mot étant relatif pour nous pauvres LCA !)
Effectivement, les "urgences" correspondent généralement chez moi à un délai de plusieurs semaines !
Ton article est vraiment super intéressant 😉 je l'ai aussi dans ma PAL, mais je le lirai plus tard, j'ai beaucoup d'autres lectures de prévues avant 🙂
Bonne soirée 🙂
Merci beaucoup ! Je te souhaite de belles lectures. 🙂
Ton billet donne envie de lire ce livre au (terrible) dénouement : si ce n'est pas une tentation cela 😉