Lecture commune avec Titine, Maggie et Filipa
Titre original : Johnson’s life of London
Traduction (2013) : Michel Faure
Robert Laffont, 2011, 339 pages
La première phrase :
Ils arrivent, encore et toujours, et montent à l’assaut du pont.
L’histoire :
L’actuel maire de Londres évoque l’histoire de sa ville de l’Antiquité à la fin du XXème siècle, à travers la vie et l’oeuvre de dix-sept personnalités marquantes, dont les accomplissements politiques, scientifiques ou artistiques contribuèrent à façonner l’image d’une capitale dynamique et influente.
Parmi eux : Boadicée . . . Hadrien . . . Robert Hooke . . . Turner . . . Florence Nightingale . . . Keith Richards . . . et bien d’autres !
L’opinion de Miss Léo :
Voici un livre que j’avais très envie d’aimer, d’autant plus que j’avais eu la chance de le recevoir gratuitement, après avoir rencontré l’attachée de presse des éditions Robert Laffont au dernier Salon du Livre (je remercie d’ailleurs Christelle pour cet envoi). Je m’attendais à une lecture fluide, drôle et instructive, mais cela fut malheureusement beaucoup plus laborieux, et surtout infiniment moins agréable que prévu. Je reste sur une impression très mitigée, et il m’est bien difficile d’exprimer une opinion tranchée, tant mes sentiments ont fluctué au cours de ma lecture. J’ai tour à tour éprouvé de l’ennui, de l’intérêt mais aussi (surtout) de l’agacement vis à vis de certains partis pris de l’auteur.
Soyons clairs : j’aime les anglais ! J’apprécie leur flegme et leur humour, ainsi que leurs scones le sens de l’auto-dérision qu’ils manifestent en toutes circonstances, y compris face aux situations les plus désespérées. J’aime Londres, ville culturellement dynamique et tournée vers l’avenir, pourvue de nombreux parcs et pubs chaleureux, et je me sens par certains côtés assez proche des britanniques, qui me semblent posséder des qualités fort appréciables, dont nous autres français sommes de façon générale cruellement dépourvus. Je ne suis cependant pas dupe, et je ne tomberai sûrement pas dans l’excès inverse, consistant à idéaliser à outrance un peuple à la mentalité très particulière. Comme tous les pays du monde, l’Angleterre se distingue par quelques attitudes assez déplaisantes, dont Boris Johnson n’hésite pas à faire l’apologie.
Ma lecture a été considérablement et régulièrement parasitée par cette façon qu’a l’auteur de tout ramener à l’argent et au libéralisme. Vous allez me dire que cela n’est pas étonnant de la part d’un maire conservateur, et que j’aurais dû me méfier . . . Soit. Il n’empêche que cela tourne ici à l’obsession, et que l’idéologie véhiculée apparaît comme très discutable. Boris Johnson semble penser que l’Angleterre ne doit sa grandeur qu’à sa domination économique, et tous les événements évoqués dans le livre se retrouvent d’une façon ou d’une autre associés à des considérations financières. La célébration de la City et des banquiers est ici un thème récurrent, et le message asséné est parfaitement clair : il faut être compétitif, afin d’asseoir la suprématie de l’Angleterre par le commerce et les échanges monétaires. Evidemment, c’est son livre, et il est tout à fait légitime qu’il y expose son point de vue. Il me semble toutefois que cela nuit au propos, et j’aurais souhaité que l’auteur s’efface davantage, afin que son livre d’histoire ne se transforme pas en oeuvre de propagande idéologique.
J’ai également été très agacée par le chauvinisme exacerbé dont fait preuve Boris Johnson (tout comme je suis exaspérée par le chauvinisme affiché par les pseudo-journalistes sportifs français pendant Roland Garros). Tous les prétextes sont bons pour faire l’apologie de l’impérialisme, et célébrer la supériorité anglaise en de multiples domaines (une domination qu’il assimile d’ailleurs à celle de l’Empire Romain en son temps : vive la référence !). Je suis la première à reconnaître le talent de nos voisins d’outre-Manche, dont la production culturelle en particulier force le respect. Que les londoniens soient des citadins créatifs, je n’en doute pas un instant. Il me parait cependant inutile de le rappeler toutes les trois pages, au risque de lasser le lecteur ! Le maire de Londres se félicite également de la prédominance de l’anglais comme langue internationale, or cette uniformisation n’a rien de réjouissant, bien au contraire.
Il me semble pour finir que l’auteur porte un regard assez condescendant sur les classes les plus défavorisées. Pour résumer : il faut améliorer les conditions de vie des pauvres, parce que cela bénéficiera aux riches (en évitant par exemple que les épidémies dues à l’insalubrité et aux mauvaises conditions d’hygiène ne se propagent aux classes supérieures de la population). Les pauvres sont en revanche indispensables au bon fonctionnement de l’économie, et il n’est donc pas question de leur permettre de s’enrichir ! Rappelons que, comme beaucoup de capitales, Londres est une métropole exclusivement réservée aux riches, et que les classes moyennes se retrouvent éjectées loin du centre-ville. Je ne trouve pas que cela “donne envie d’être londonien”, comme le clame la quatrième de couverture !
Je reproche également à cet ouvrage de nombreuses imperfections formelles. Boris Johnson affiche clairement la (louable) volonté de rendre son Histoire de Londres accessible au plus grand nombre. Je trouve que le récit en pâtit, et reste globalement trop anecdotique pour être véritablement intéressant (malgré quelques passages relativement amusants). La chronologie est parfois difficile à suivre, l’enchaînement des événements souvent confus, et le langage très familier accentue le côté grand-guignolesque de certaines situations. Le récit, très vivant mais profondément stérile, aborde trop de thèmes et d’époques différentes pour que cela soit traité autrement que de façon superficielle. J’ai été gênée à plusieurs reprises par la lourdeur des interventions de l’auteur, qui se livre à de multiples suppositions farfelues, dans le registre “on refait l’Histoire” : et si tel personnage avait agi différemment ? et si Mellitus n’avait pas fondé cette minable église en bois sur le site de St Paul ? et si et si et si ? Ce procédé m’agace, et n’apporte franchement pas grand chose au débat.
Tout cela donne un texte hybride, aux intentions mal définies, auquel il est par conséquent difficile de s’intéresser, malgré la richesse et la diversité des personnages étudiés. J’ai cependant apprécié de retrouver des figures historiques marquantes, comme Hadrien ou William Shakespeare. Le début du livre est à cet égard très prometteur, en ce qu’il nous donne à découvrir une période méconnue de l’Histoire britannique, à savoir l’essor du pays sous l’Empire Romain, à une époque où Londres n’était encore qu’un vaste marécage. J’ai appris des choses (que je me suis empressée d’oublier), et j’ai trouvé l’approche plutôt originale. La suite est plus classique, et évoque des événements mieux connus, comme la Grande Puanteur de 1858, ou encore le Blitz.
L’ouvrage prend parfois des allures de “guide de voyage”, ce qui se révèle plutôt amusant. L’auteur cite des lieux, et donne quelques idées de sites à visiter, en les replaçant dans leur contexte historique. La ville a évidemment beaucoup changé depuis, mais cet éclairage n’en demeure pas moins intéressant. Le récit est quant à lui articulé autour de la présence symbolique du célèbre London Bridge is falling down, pont stratégique dont les démolitions et les reconstructions successives marquèrent l’histoire de la ville. Ce sont deux mille ans d’évolution et de progrès qui défilent ainsi sous nos yeux, dans une saisissante mise en perspective.
Les chapitres qui m’ont le plus intéressée (en dehors de ceux sur l’Antiquité) sont les chapitres dédiés à la culture et aux sciences, ainsi qu’aux améliorations de la qualité de vie à l’époque victorienne : J.M.W.Turner, précurseur de l’impressionnisme, Hooke, éternel rival de Newton, Shakespeare, qu’on ne présente plus, mais aussi Florence Nightingale, qui (ré)inventa le métier d’infirmière . . . J’ai cependant été souvent déçue par la façon dont nous étaient présentés ces personnages, les remarques biographiques pertinentes étant souvent diluées dans une multitude de digressions inutiles. Signalons également quelques choix de personnalités discutables et sans grand intérêt, du moins de mon point de vue : Richard Whittington, premier grand banquier londonien (encore et toujours l’argent), Lionel Rotschild, financier de l’Empire (no comment), ou encore Keith Richards (un chapitre bien trop “people” à mon goût).
Vous l’aurez compris, je ne suis pas particulièrement enthousiaste au sujet de ce livre, dont je ne vous recommanderai donc pas la lecture. Dommage ! N’hésitez cependant pas à lire les avis de mes camarades de LC (voir ci-dessus).
Un livre d’histoire(s) non dénué d’intérêt, mais trop confus, et véhiculant parfois des idées discutables.
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Nouvelle participation au Mois Anglais.
Nous sommes d'accord sur ce livre qui devient pénible au fur et à mesure des chapitres. J'ai trouvé le début (jusqu'au 18ème environ) plutôt cohérent et intéressant mais après cela devient du grand n'importe quoi.
Ma lecture a été tellement décousue que j'ai eu du mal à en sortir un billet cohérent !
Nous avons visité il y a 2ans le musée de la ville de Londres : intéressant.
Je vais à Londres cet été. Je retiens l'idée !
Je ne connaissais pas ce titre mais grâce à toi je sais que je peux l'oublier illico ! J'espère que ta prochaine lecture sera plus réjouissante
Effectivement, je ne le conseille pas. Rassure-toi, mes lectures en cours sont bien plus agréables !!
Définitivement, je ne note pas ce titre (d'autant qu'il existe beaucoup d'autres ouvrages dans le même genre qui sont eux, passionnants du début à la fin) !
Tu ne perds pas grand chose.
C'est tout ce qu'on aime pas. Billet argumenté Miss Léo !
Merci ! J'ai essayé d'analyser le pourquoi du comment, mais ça n'a pas été facile.
Je n'aimais déjà pas le personnage et ce que tu écris ne va pas me réconcilier avec lui. Sans compter que j'en ai marre de ces hommes politiques qui se prennent pour des historiens (et on en a une flopée en France !)
Tu évoques un point dont j'ai oublié de parler dans mon billet. Tout à fait d'accord avec toi !
Eh bien, voilà un livre que je n'achèterai pas ! L'apologie du libéralisme serait déjà pénible, mais si en plus il est chauvin à outrance…Ce ne sera donc pas un livre pour parfaire ma culture londonienne, dommage !
J'étais moi aussi un peu déçue.
Très bon billet Miss Léo, très complet. J'hésite depuis sa sortie à lire ce livre mais je m'en faisait une idée complètement différente de celle que tu décris. Je m'attendais à une suite d'anecdotes, d'insolites, à la fois drôles et intelligentes. Ton résumé me fait bien hésiter (ben oui, j'ai déjà un chauvin british à la maison, je n'ai pas besoin d'un deuxième ;-)). Bon à feuilleter peut-être!
Il y a effectivement des anecdotes, et Boris Johnson est de toute évidence un individu cultivé, mais j'ai trouvé cela plutôt mal fichu, et globalement assez décousu. Sans parler des idées insupportables que j'évoque dans mon billet…
J'ai lu pas mal d'avis mitigés voire carrément négatifs. Je passe mon tour pour ce titre. Dommage car il a l'air assez original.
Bonne soirée! 🙂
La recherche de l'originalité ne donne pas forcément un bon livre. La preuve !
Excuse-moi, je n'ai pas pu terminer à temps… J'espère que je vais le finir pour le mois anglais…
Arff, c'est dommage car il avait l'air super sympa. Je passe mon tour du coup, ou alors j'attendrais de pouvoir le feuilleter à la bibli.
J'ai lu il y a quelques mois l'avis de Titine qui m'a semblé proche du tien.
Je ne retiens donc pas ce titre, dommage car le thème de fond m'intéressait.