Le temps des métamorphoses – Poppy Adams

Titre original : The behaviour of moths
Traduction : Isabelle Chapman
Editions Belfond, 2008, 330 pages

 
Les premières phrases :

Il est deux heures moins dix de l’après-midi, et depuis une heure et trente minutes j’attends Vivi, ma petite soeur. Elle s’est enfin décidée à rentrer à la maison.
 
L’histoire :

Virginia Stone, vieille femme solitaire et lépidoptériste renommée, comme son père avant elle, attend la visite de sa soeur Vivien, qu’elle n’a pas revue depuis plus de cinquante ans. Virginia vit depuis sa plus tendre enfance dans un manoir isolé de la campagne anglaise, grande bâtisse glaciale et austère, dont les murs tapissés de papillons furent jadis les témoins de terribles drames familiaux. Elle envisage avec enthousiasme et appréhension le retour inespéré de sa “petite soeur chérie”, dont l’arrivée imminente remue de vieux souvenirs, réveillant d’anciennes rancoeurs et provoquant l’exhumation de redoutables secrets, dissimulés depuis des décennies.

 

L’opinion de Miss Léo :

 

Difficile d’écrire un billet sur un livre trois mois après l’avoir lu, surtout quand le livre en question appartient à la bibliothèque municipale… J’ai un peu honte ! Je me souviens cependant d’avoir pris beaucoup de plaisir à la lecture de ce roman, repéré chez Lou au tout début de ma carrière de blogueuse. Le temps des métamorphoses est un huis clos à l’ambiance vaguement oppressante, se déroulant dans un cadre très “british”, presque gothique :  j’ai aimé les descriptions du vieux manoir familial, dont les pièces désormais vides de tout ornement résonnent encore des drames d’autrefois. Un cadre idéal pour une tragédie riche en rebondissements, dont l’atmosphère m’a parfois rappelé certains films d’Hitchcock (allez savoir pourquoi, j’ai pensé à plusieurs reprises à LA scène du verre de lait de Soupçons au cours de ma lecture).

 

Les deux soeurs entretiennent des relations très ambiguës, un mélange complexe d’amour, de haine et de jalousie. Il est bien difficile de les aimer, encore plus de décider laquelle des deux est la plus à plaindre ! Virginia est un personnage très froid, certes brillante, mais dont l’absence d’émotions et le pragmatisme ont quelque chose d’effrayant, voire de monstrueux dans certaines circonstances. Vivien semble quant à elle terriblement manipulatrice et égoïste, mais s’ancre néanmoins dans une certaine modernité, et se révèle finalement la plus équilibrée des deux. Le récit adopte le point de vue de Virginia, ce qui fausse un peu la donne, celle-ci donnant évidemment sa propre lecture des événements, à travers une succession de flashs-backs et de retours au présent, avant d’en arriver aux retrouvailles, point d’orgue du roman.

 

Le lecteur est tenu en haleine par une succession de rebondissements et de révélations, qui nous en apprennent à chaque fois davantage sur l’histoire des deux soeurs. J’ai malheureusement été un tout petit peu déçue par la fin, qui laisse en suspens un certain nombre de questions. Poppy Adams entretient jusqu’à la dernière page une certaine ambiguité concernant le personnage de Virginia, la narratrice : est-elle folle ? Les événements relatés se sont-ils bien produits de cette façon ? Pourquoi Vivien est-elle partie ? Pourquoi les souvenirs des deux soeurs sont-ils aussi différents ? Et si tout cela n’était qu’une affabulation du cerveau malade de Virginia, vieille femme sénile et perturbée ?? Au lecteur de se faire sa propre opinion !

 

L’écriture est assez prenante, en dehors de quelques formules narratives agaçantes, qui m’ont un peu énervée, mais dont j’ai vite compris qu’elles étaient en accord avec le personnage de Virginia (soyons honnêtes, celle-ci radote un peu). J’ai aimé les digressions scientifiques, dans lesquelles certains verront peut-être d’inutiles longueurs, mais qui m’ont personnellement plutôt intéressée. Le roman évoque l’univers des lépidoptéristes, ce qui est en soi original. Virginia partage la passion pour les papillons de son père Clive, et sa vie entière gravite autour de l’étude de ces fascinants insectes.

 

C’est donc sur une impression globalement positive que je refermai à regret ce sympathique roman, par lequel vous pouvez sans problème vous laisser tenter si vous en avez l’occasion. Les amateurs de manoirs anglais et d’histoires de secrets de famille seront comblés !

 

Un huis clos anxiogène aux relents de mystère. Plaisant, sans être exceptionnel. 

 

13 thoughts on “Le temps des métamorphoses – Poppy Adams

  1. Un livre que je vais bientôt lire et qui devrait me plaire d'après ce que tu en dis. J'aimerais pouvoir encore écrire de tels billets après 3 mois 🙂

    1. Je me suis rendu compte que j'en avais encore un souvenir assez précis, même si j'ai oublié quelques détails de l'intrigue ! J'attends avec impatience de lire ton avis.

  2. Je n'aime pas trop les fins où on doit choisir (et la toupie, elle tourne ou elle va tomber ?). Et j'avoue que les papillons ne me passionnent pas des masses surtout quand ils sont sur des murs.

    1. Ah, mais moi, j'ai bien aimé la fin d'Inception ! Un peu frustrant, certes, mais bien dans le ton du film.
      Les papillons ne me passionnent pas non plus en général, mais l'angle d'approche est ici très scientifique, et l'auteur semble s'être bien documentée.

    2. Je n'aime vraiment pas ce type de fin qui nous laisse dans l'expectative et il y avait déjà eu Shutter Island qui avait fait le même coup dans l'année – quoique pour moi dans Shutter Island c'était clair, c'est quand j'ai réalisé que les autres n'avaient pas compris comme moi que je me suis dit que c'était une fin ambiguë ^^ Et donc une fin frustrante par an, c'est mon maximum !

    1. Il y a quand même une fin et un dénouement, et l'on peut sans doute s'en satisfaire, mais le roman soulève des questions quant à la possible folie de la narratrice, auxquelles il n'apporte pas de réponse tranchée. Cela m'a un peu gênée, mais j'y ai peut-être accordé trop d'attention !

  3. Je vais le lire très bientôt puiqu'il fait l'objet d'une LC début mars à laquelle je participe. Je pense que je vais beaucoup aimé l'ambiance façon "Soupçons" !

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