Editions Grasset, 2016, 198 pages
La première phrase :
L’histoire :
Je n’avais jamais entendu parler d’Hugo Boris avant la sortie de ce roman, dont le thème me semblait toutefois alléchant. Les nombreuses critiques élogieuses ont achevé de me convaincre !
Virginie est une jeune femme parfois un peu borderline, perturbée par de poignantes problématiques d’ordre personnel, qui tendent à brouiller sa perception des événements. La vie privée ne doit pas interférer avec le travail, mais il est difficile de rester lucide et concentré lorsqu’on est à ce point chamboulé émotionnellement, d’autant plus que la mission dont les policiers doivent s’acquitter présente pour eux un caractère fortement inhabituel, qui bouscule les certitudes de ces professionnels pourtant aguerris. Privés de repères, Virginie et ses deux comparses vont prendre des décisions pour le moins surprenantes au cours des quelques heures tumultueuses qui les conduiront des rues parisiennes désertes jusqu’au tarmac de l’aéroport de Roissy, en passant par un centre de rétention, une station-service et quelques échangeurs autoroutiers nimbés de lumière artificielle.
L’ambiance nocturne de Police m’a beaucoup plu ! L’auteur parvient à installer une atmosphère très particulière, qui voit le drame se nouer dans un environnement presque totalement silencieux. Les personnages parlent peu, mais se posent beaucoup de questions (on peut même dire que c’est le gros bordel dans leurs têtes). Flics en service, ou êtres humains déboussolés ? La frontière se brouille progressivement, ce qui crée un suspense à l’issue incertaine. Le roman n’est pas bien-pensant ni manichéen, comme j’ai pu le lire dans certaines critiques. Les policiers ne sont en aucun cas présentés comme des héros ou des modèles de bonté et de bienveillance : bien au contraire, on les devine capables de péter les plombs à tout moment, en raison de leur état de fatigue extrême. Il est par ailleurs intéressant de noter à quel point le réfugié tadjik est passif, pour ne pas dire inexistant. Hugo Boris crée un personnage totalement transparent, qui joue surtout le rôle de déclencheur, et dont la présence controversée entre en résonance avec les préoccupations d’ordre personnel des policiers (oh la jolie phrase qui ne veut rien dire !). Ceux-ci se posent certes la question du bien-fondé de leur mission, mais ne nouent aucun lien tangible avec le prisonnier qu’ils escortent, qui aurait aussi bien pu ne pas être là (ne lisez surtout pas Police en espérant découvrir un pamphlet politique contre l’expulsion des immigrés clandestins, vous risqueriez d’être fortement déçu).
Il s’agit donc d’une belle réussite, même si j’ai trouvé que les atermoiements de Virginie étaient parfois un peu répétitifs, et que le roman s’essoufflait légèrement dans son dernier tiers. Je n’ai pas été totalement convaincue par le dénouement, et la scène de l’avion m’a semblé quelque peu surréaliste et tirée par les cheveux (vous comprendrez de quoi je veux parler lorsque vous aurez lu le roman). L’ensemble demeure toutefois parfaitement maîtrisé, et je lirai avec plaisir d’autres ouvrages d’Hugo Boris (j’ai cru comprendre que Trois grands fauves et La délégation norvégienne étaient tout aussi enthousiasmants, quoique très différents).
Un roman percutant, intelligent et bien mené. A lire !
D’autres avis : Laure (qui n’a pas aimé), Une Comète, Fleur, Eva, Kathel, Delphine-Olympe
On en parle aussi dans l’émission de novembre des Bibliomaniacs !
Toujours très tentée, malgré les bémols que j'ai vu fleurir ici ou là dernièrement…!
J'ai pu t'entendre dans Bibliomaniacs et je retrouve ici ton avis positif. Quant à moi, comme tu le sais, je fais partie des vilains petits canards qui n'ont pas aimé.
Mais je ne saurais trop te recommander en effet la lecture l'étonnante Délégation norvégienne et, surtout, du superbe Trois grands fauves !
je suis d'accord avec Noukette, les bémols sont de plus en plus récurrents mais j'aimerais me faire mon propre avis.
C'est maîtrisé mais tu as quand même de nombreux bémols. Et je reste persuadé qu'il n'est pas pour moi.
Tu me donnes envie de le lire en tout cas. Je vais essayer de le trouver à la médiathèque, le thème m’intéresse bien.
Une lecture que j'avais adoré, un coup de coeur.
Nous n'avions pas vraiment pris le temps d'échanger sur la fin du roman dans l'émission mais mon avis rejoint le tien. Je pense que je me serais bien passée de cette fin, qui manque de crédibilité.