Lecture commune avec Eliza, Shelbylee, et Hébélit
Editions du Masque, collection Labyrinthes
eBook Kindle, 2010, 290 pages
Les premières phrases :
Reprendre son souffle, étouffer les hurlements de terreur qui montent dans sa gorge, ne pas esquisser le moindre geste… La jeune femme, dissimulée derrière une tapisserie, tente de rester parfaitement immobile et de maîtriser le rythme tumultueux de sa respiration.
L’histoire :
Janvier 1651. La Fronde des princes continue de semer le trouble et la désolation dans un Royaume de France déjà très affaibli, en guerre contre ses voisins espagnols. La Régente et le jeune Louis XIV sont retenus au Palais-Royal, tandis que le cardinal Mazarin se réfugie à St Germain puis à Brühl, après s’être aliéné le duc d’Orléans. C’est dans ce contexte politique incertain que François, devenu chevalier de Rohan Montauban, regagne son domaine auvergnat de Mont Menat, où l’attend sa tendre et délicieuse épouse Nolwenn. Hélas ! A peine a-t-il franchi la porte du château que son domestique l’informe d’une bien sinistre nouvelle : Nolwenn a été enlevée, après avoir assisté à l’assassinat de sa cousine Violette de Goyon, insolente courtisane dont le corps sans vie gît encore sur le lit de la châtelaine. Désemparé et furieux, François chevauche vers Paris, où il retrouve son ami Arnaud et sa soeur Louise. Il se met alors en quête de sa bien-aimée, et consacre toute son énergie à démasquer l’auteur de ce meurtre sordide. Et si l’enlèvement de Nolwenn n’était qu’un simple rouage dans l’engrenage d’une vaste conspiration politique ? Que recèle donc ce mystérieux coffret que Violette avait en sa possession (le fameux “jeu de dupes”) , qui semble être l’objet de toutes les convoitises ?
L’opinion de Miss Léo :
Autant le dire tout de suite : ce deuxième volume des aventures de François de Rohan Montauban ne restera pas pour moi un grand souvenir de lecture ! Bien au contraire, il m’a semblé que tous les petits défauts entrevus dans L’héritier des pagans étaient ici amplifiés, et que la qualité du roman s’en trouvait considérablement affectée.L’arrière-plan historique demeure séduisant, mais je l’ai trouvé moins intéressant, et surtout nettement moins bien exploité que dans le premier tome. J’ai aimé la description du contexte politique, ainsi que la référence aux conditions de vie parfois misérables du petit peuple parisien. Rien de très original, mais l’auteur a le mérite de s’être correctement documentée. L’apparition inattendue de Jean-Baptiste Poquelin (monsieur Molière himself) est quant à elle plutôt sympathique, bien que totalement gratuite et tirée par les cheveux.
Le principal problème de ce Jeu de dupes réside dans l’intrigue et dans les personnages, creux et inintéressants au possible. François est un héros antipathique et immature, dont les réactions semblent surjouées et souvent peu crédibles. Sa soeur Louise est une ravissante potiche, éperdue d’admiration pour son frère et son mari. Les autres personnages secondaires sont tout aussi transparents. L’aspect psychologique n’est pas du tout travaillé, les dialogues sonnent faux, et l’on a souvent l’impression d’assister à un spectacle joué par de bien mauvais acteurs. Ajoutons à cela une intrigue sans grand relief, ponctuée de quelques scènes ridicules, et nous avons tous les ingrédients d’un mauvais roman. On se croirait parfois dans une aventure policière de la Bibliothèque Verte, avec un poil de violence et de sexe en plus !Si les aventures rocambolesques et sans prétention vécues par François dans L’héritier des pagans avaient su me séduire par leur fraîcheur et leurs multiples rebondissements, il n’en fut malheureusement pas de même dans ce deuxième opus. L’intrigue patine, et les personnages passent leur temps à discutailler. Pour ne rien arranger, j’ai deviné le dénouement et l’identité du “coupable” bien avant la moitié du livre (sans avoir cherché à deviner quoi que ce soit, ce qui est révélateur de la piètre qualité de l’intrigue). J’ai été très déçue par le soi-disant rebondissement final, totalement attendu et prévisible : j’espérais m’être trompée, tant mon hypothèse me paraissait grossièrement évidente !
Venons en maintenant au style de l’auteur, dont les carences et les maladresses m’ont davantage gênée ici que dans le premier tome. Après les “notre jeune héros” du premier épisode, voici que Morata nous sert du “gentilhomme” à toutes les sauces ! “Le gentilhomme le regarda”, “nos gentilhommes apprirent ainsi que Ninon s’était retrouvée convoquée au Palais-Royal”, “notre gentilhomme se raidit refusant de se laisser amadouer”, “le gentilhomme serra les poings”… Ridicule et agaçant (oui, je sais, je m’énerve pour rien). D’autres expressions laissent songeur par leur anachronisme : “Nolwenn est une battante”, “Lénora était d’ailleurs une pickpocket de talent” (j’ai vérifié dans le Robert, le terme pickpocket date de 1765)…
Que dire de Javier, cet espagnol qui s’exprime avec aisance dans un français tout à fait correct et recherché, et qui ne peut cependant pas s’empêcher de prononcer toutes les dix phrases quelques mots dans sa langue d’origine (des fois que le lecteur n’aurait pas bien saisi de quelle nationalité il était) ? Encore une fois, j’ai trouvé que cela manquait de crédibilité…
A ceux qui me feraient remarquer que je ne serais probablement pas capable d’en faire autant : certes, mais je ne suis que blogueuse loisir, pas écrivain !
Vous l’aurez compris, je suis plus que déçue par cette suite. Peut-être suis-je devenue trop exigeante… Le roman d’Anne-Laure Morata a en effet beaucoup de mal à soutenir la comparaison avec mes autres lectures récentes. La concurrence était rude, puisque je l’ai lu juste après Le Roi Transparent, brillant roman d’aventures médiévales de la très talentueuse Rosa Montero, et juste avant Le Lys dans la Vallée, de Vous-Savez-Qui (billet à paraître prochainement). Il est évident que Morata n’a jamais eu la prétention de rivaliser avec Balzac, mais il n’empêche que les nombreux défauts évoqués plus haut m’ont empêchée d’apprécier ce roman, vite lu et vite oublié en ce qui me concerne.
N’hésitez pas à lire les avis de mes copines de LC : peut-être l’auront-elle apprécié davantage !
Un coup de gueule pour finir : j’ai lu le roman dans une édition numérique calamiteuse et constellée d’erreurs typographiques, qui m’ont rendu la lecture très pénible. J’ai même trouvé une (énorme) faute d’orthographe, que j’ai oublié de relever ! Messieurs les éditeurs, un petit effort : cette édition n’étant pas gratuite (loin s’en faut), nous sommes en droit d’exiger un minimum de qualité.Des aventures qui manquent de rythme et d’intérêt. Un roman bien décevant !
Bon ben je vois que ça ne s'arrange pas. Même réflexion sur l'édition de l'ebook. Pour le reste, je suis d'accord avec toi, même si j'évoque aussi d'autres passages dans mon billet, mais je ne doute pas que tu les auras relevés aussi !
J'ai parlé de "scènes ridicules", qui englobent tout ce dont tu parles dans ton billet ! Je suis contente de ne pas être la seule à trouver François antipathique.
Tu comprends sans doute pourquoi je ne parviens pas à rédiger mon avis ! Je suis entièrement d'accord avec ce que tu dis !
Je comprends tout à fait. J'ai moi-même hésité, sentant que mon billet pourrait vite devenir méchant…
Je comprends mieux pourquoi je me force à le lire. Au début je croyais être la seule. Ouf ! Donc, je dois le terminer…
Non, Syl., tu n'es pas seule ! J'avoue que je me suis demandé plusieurs fois s'il était bien utile de continuer…
Je suis d'accord avec ton avis et celui de Shelbylee mais en même temps je ne le trouvais déjà pas bien sympathique ce "héro" donc pas trop de déception de mon coté !
Complètement d'accord avec toi sur le caractère de François, de sa soeur Louise ou des autres : beaucoup trop mièvre tout ça… 😉 Et je trouve ça très énervant ces fautes dans l'édition numérique !!